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Dans « L'enseignement de l'ignorance », Jean-Claude MICHEA
nous informe qu'en 1995, 500 hommes politiques, leaders économiques
et scientifiques de premier plan, constituant à leurs yeux l'élite
du monde, commencèrent à reconnaître comme une évidence
qui ne mérite pas d'être discutée, que dans le siècle
à venir, deux dixièmes de la population suffiront à
maintenir l'activité de l'économie mondiale.
Une question essentielle se pose donc: comment serait-il possible de maintenir
la « gouvernabilité » de 80 pour cent d'humanité
surnuméraire, dont l' inutilité a été programmée
par la logique libérale.
La solution fut trouvée par Brzezinski, ancien conseiller de J.
Carter sous le nom de « tittytainment » : il s'agit de définir
un cocktail de divertissement abrutissant et d'alimentation suffisante
permettant de maintenir la bonne humeur le la population frustrée
de la planète. Cela autorise à établir le cahier
des charges de l'éducation de l'école à venir. II
faut d'abord définir un pôle d'excellence: il devra être
en mesure de transmettre des savoirs sophistiqués et créatifs,
ce minimum de culture et d'esprit critique sans lequel l'acquisition de
savoirs n'a aucun sens ni surtout aucune utilité véritable.
Pour les compétences moyennes, il s'agit de définir des
savoirs jetables, aussi jetables que les humains qui en sont les porteurs,
dans la mesure où, s'appuyant sur des compétences plus routinières
et adaptées à un contexte technologique précis, ils
cessent d'être opérationnels sitôt le contexte dépassé.
C'est ce savoir qui, ne faisant pas appel à la créativité
et l'autonomie de pensée, est à la limite un savoir qui
peut s'apprendre seul, c'est à dire chez soi, sur un ordinateur
et avec le didacticiel correspondant ; ce pourrait être l'enseignement
multimédia.. Restent enfin les plus nombreux, les flexibles, ceux
qui ne constituent pas un marché rentable et dont l'exclusion de
la société s'accentuera à mesure que d'autres continueront
à progresser. La transmission de savoirs réels, coûteuse
et donc critique n'offrira aucun intérêt pour le système,
voire pourra constituer une menace pour sa sécurité.
C'est évidemment pour ce plus grand nombre que l'ignorance devra
être enseignée de toutes les façons concevables. Pour
cela Debord dans " Commentaire sur la société de spectacle
" nomme cette immense entreprise la dissolution de la logique et
dit: « il faut enseigner la perte de la possibilité de reconnaître
ce qui est important et ce qui est mineur, ce qui est incompatible ou
pourrait être complémentaire ». L'élève
ainsi placé d'entrée de jeu au service de l'ordre établi,
connaîtra pour l'essentiel le langage du spectacle, car c'est le
seul qui lui est familier c'est celui qu'on lui a appris. Vous le voyez,
nous ne sommes pas dans la pensée unique, je pense que nous ne
l'avons jamais été: nous sommes prisonniers d'un système
de croyances et de pensées qui lui-même dénonce l'existence
d'une soi disant pensée unique pour nous éloigner des vraies
questions: comment la transmission des savoirs, de la culture, l'utilisation
des découvertes scientifiques et des techniques peuvent ils être
les relais sans faille, les soldats du jusqu'au-boutisme, de la mondialisation
c'est-à-dire du règne sans partage du marché financier
et de la faillite planétaire qu'il décide, organise et planifie
pour 95% d'êtres humains …/…
NB : Dans son livre, Michéa cite notamment, comme Club des Elites
Mondiales,
- le « siècle », la fondation Gorbatchev, sous l'égide
de laquelle se sont réunis les 500 hommes cités...
- European Round Table
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